Après la Saint Nicolas, passons à un autre élément fondamental de la préparation de Noël en Alsace : les bredele ! Il s’agit de petits gâteaux secs qu’on prépare en général pendant l’Avent, et qu’on servira pendant toute l’année avec le café ou le goûter. Enfin, quand je dis : « toute l’année », c’est tant qu’il en reste, bien sûr ! L’intérêt de ses gâteaux tient non seulement au fait qu’ils sont bons, mais aussi au fait qu’ils sont extrêmement variés, j’imagine que chaque grand-mère alsacienne a mis au point ses recettes, quand on imagine le nombre de grand-mères qu’il a dû y avoir dans la région à travers les âges, on a une assez bonne idée du nombre de recettes.
Les plus classiques, sur la table familiale, étaient les Schwowebredele (gâteaux Souabes), les Nussbredele (gâteaux aux nois), les Spritzbredele (gâteaux spritzés), les Anisbredele (gâteaux à l’anis), les seuls que ma mère a longtemps préféré acheter, avant de comprendre le truc, et des « Schüm schüm » (des petites meringues). À ce stade, je me sens obligé d’ouvrir une petite parenthèse vocabulaire :
Spritzer : verbe du premier groupe, en usage dans les régions de parler alémanique (attention, c’est très important et ça peut être un gage de survie dans l’Est : je n’ai pas dit « allemand »), dont le sens se trouve quelque part entre « gicler » et « éclabousser ».
Exemple : « Pendant leur bain, les garçons ont fait spritzer de l’eau dans toute la salle de bains, c’est vraiment n’importe quoi. Je peux te le dire, ça a shissé cinq minutes ! »
Dans le cas des Bredele, on qualifie de « spritzbredele » un gâteau dont la pâte est « spritzée » sur la plaque de cuisson. En France, on dirait qu’on utilise une poche à douilles. Personnellement, j’adore ce nom qui explique de manière très imagée comment le gâteau est fait. Ce qui n’est pas le cas du Schwowebredele !
Pendant les quelques mois qui suivaient Noël, ces gâteaux étaient conservés dans des boîtes en fer blanc, où ils restaient aussi bons qu’au premier jour. Ils allaient alimenter une assiette posée sur la table du salon et à disposition de tout le monde, qui n’était vide (et rangée) que quand il n’y avait plus rien. Ces gâteaux permettent de préparer la fête, et d’en garder un peu l’esprit pendant les quelques mois qui la suivent. C’est peut-être pour ça qu’ils sont faits en grosse quantité, et dans une grande variété de formes et de recettes.
Aujourd’hui, je vous propose une petite recette, pas forcément de mes préférés, mais de ceux que j’ai fait le jour de la rédaction de ce billet : les petits gâteaux à la cannelle1. Si vous restez jusqu’au bout, je vous dirai où trouver deux autres recettes. J’ai suivi la recette donnée par Suzanne Roth dans son « s’Bredlebuech » – rassurez-vous, le livre est rédigé en français.
Ingrédients
- 500g de farine
- 250g de sucre
- 250g de beurre
- 3 œufs
- 1 cuiller à soupe de cannelle
- zeste d’un citron
- 1 jaune d’œuf pour dorer
Préparation
- Mettre la farine en fontaine, ajouter le beurre coupé en morceaux, la cannelle, le sucre, le zeste de citron et les œufs. Mélanger du bout des doigts et former une pâte souple. Laisser reposer au frais pendant 24h.
De mon côté, j’ai mis tout ça dans le bol de mon robot, et j’ai utilisé la feuille pour mélanger. Je me demande si ça n’aurait pas été mieux avec le crochet… Dans tous les cas, la pâte sera collante, avec la quantité de beurre qu’il y a dedans, c’est normal, donc n’allez pas ajouter de la farine.
Avant de la mettre dans le bas de mon réfrigérateur, je l’ai légèrement aplatie, et je l’ai emballée dans du film alimentaire. - Le lendemain, abaisser la pâte à un demi centimètre d’épaisseur et la découper à l’emporte-pièce en diverses formes.
N’essayez pas d’abaisser toute la pâte d’un coup, allez-y par petites portions, ça sera beaucoup plus simple : prenez une tranche et laissez le reste au réfrigérateur. La pâte était très collante après le mélange, elle l’est un peu moins après réfrigération mais elle l’est toujours : ne lésinez pas sur la farine, aussi bien sur votre plan de travail que sur votre rouleau. - Mettre les gâteaux sur une tôle beurrée, dorer au jaune d’œuf et faire cuire à four moyen (180° / thermostat 6) pendant environ 15 minutes.
Je n’utilise jamais de tôle beurrée, je les ai déposés sur du papier sulfurisé. Mais le résultat est à peu près le même.
Un petit truc que j’ai lu je ne sais plus où : pour faciliter la dorure au jaune d’œuf, vous pouvez mettre quelques gouttes d’une huile neutre dans votre jaune. De mon côté, un seul jaune a suffi pour tout dorer.

C’est tout. Un peu long : il faut attendre. Mais sinon, c’est une recette très simple. Je crois que je préfère un peu les Schwowebredele, mais là on est plus sur une question de goûts. Quoi qu’il en soit, que ce soient ces gâteaux ou les Schwowebredele, ils proposent tous de se poser une question qui tient en haleine les meilleurs mathématiciens, les carreleurs et les pâtissiers du monde entier : comment placer ses formes pour avoir le moins de pertes possible (les matheux vont parler de « pavage d’un plan », mais c’est exactement cette idée là). C’est là qu’on se rend compte qu’il est important d’avoir plusieurs formes différentes. Et puis, c’est tellement plus amusant !


Pour la petite histoire — c’est une chose que j’évite en général de mentionner un dimanche, mais on m’a posé la question par ailleurs alors j’y réponds par avance —, au moment de la cuisson de ces gâteaux, je portais des bas Séduction bicolore Cervin tenus par un porte-jarretelles Dita (j’en parlerai bientôt). Je vous assure qu’il n’y avait aucune tension sexuelle d’aucune sorte dans l’exécution de cette recette de cuisine. La manière de considérer les bas, que ce soit pour soi ou pour les autres, est vraiment une question de contexte.
Je vous ai promis en début d’article de vous dire où trouver d’autres recettes de Bredele. Je pense que le web en regorge , mais il y en a deux que je veux mettre un peu en avant :
- une recette de Schwowebredele chez Justin – il les a préparé beaucoup trop tôt, mais on ne lui en veut pas, c’était pour la bonne cause !
- Péla vous propose la recette d’un sablé, le Kipferl vanille, que je ne connais pas mais qui semble lui aussi très sympa ! Attention, ses photos sont diaboliques, elles risquent de vous donner vraiment envie d’essayer !
Je vous laisse, il faut que je choisisse la recette des prochains bredele que je vais faire !
- pas de nom en alsacien pour ceux-là, il n’est pas donné dans le livre et je ne le connais pas. ↩︎

Laisser un commentaire