Chemin de soie

J’ai lu un article. Certaines personnes lisent des livres, pour ma part je n’en prends que rarement le temps, niveau livres je me limite principalement à une littérature de loisirs. Mais je prends quand-même le temps de lire des articles, c’est plus court. Bref, j’ai lu un article. Un article qui parlait de bas et de porte-jarretelles. Mais qui disait quelques bêtises sur le sujet.

L’article en question était une chronique de Gaspard Kœnig, une chronique qu’il avait fait paraître dans Les Echos en mars 2019, ce n’est pas de toute première fraîcheur mais ça reste d’actualité en cette année olympique. C’était une chronique qui parlait du voile. Pas du bas voile, du voile tout court, celui qui est lié à une religion et qui fait encore parler de lui actuellement¹. Sur ce sujet précis, permettez-moi de conserver mon opinion pour moi, je devrais avoir des écrits qui l’évoquent indirectement plus tard, on verra en temps voulu.

Comment passer du voile ou des vêtements associés à un caractère religieux, au porte-jarretelles ? De la façon la plus simple qui soit : en passant par la soumission et le patriarcat, pardi ! Qu’il s’agisse d’un homme de paille ne lui vient pas à l’esprit. On peut lui pardonner, il n’est pas le seul à penser ça. Ce qui est plus difficile à pardonner, par contre, c’est qu’il fait ici un magnifique hors sujet ! En effet, il met sur un pied d’égalité en tant que marqueurs de domination masculine un vêtement bien visible (le voile) et un sous-vêtement, qui sera la plupart du temps caché (le porte-jarretelles). Morceaux choisis :

Oscillant entre la pure pornographie et la lingerie sexy, il [le porte-jarretelles] reflète la domination masculine de la manière la plus crue. Est-ce parce-qu’il fait de la femme une prisonnière ligotée dans l’attente du mâle, ou parce-qu’il la transforme en cadeau à déballer, ou parce-qu’il dénude sans déshabiller ? Toujours est-il que le porte-jarretelles, qu’il soit porté « volontairement » ou sous la subtile contrainte d’un cadeau d’anniversaire, reproduit un schéma séculaire d’oppression patriarcale.

J’aimerais inviter monsieur Kœnig à s’instruire sur son sujet², il me semble qu’il le fait en général mais en l’occurrence, il montre surtout son désintérêt pour un thème qu’il n’a visiblement abordé qu’à travers le prisme de la pornographie – là aussi, il faudra peut-être que j’en reparle à l’occasion. Qu’il ne soit pas attiré par ce vêtement, très bien, c’est le cas de gens tout à fait recommandables, j’en connais quelques uns avec qui je m’entends plutôt bien par ailleurs. Mais je discute assez peu de lingerie en dehors de ce lieu, ceci explique peut-être cela. Mais si ce vêtement ne l’attire pas et qu’il n’y connaît pas grand-chose, peut-être pourrait-il s’abstenir d’en parler, ça sera toujours mieux que raconter n’importe quoi et sortir des clichés tellement éculés que j’en ai fait des articles d’Objections ici ! Est-ce que, quand je mets mon porte-jarretelles, je me sens victime d’une oppression patriarcale…? Bon, euh… je ne dois pas être l’exemple type qu’il avait en tête en écrivant. Qu’en est-il de mes éventuelles lectrices…?

En pratique et après un peu de réflexion, je ne suis pas sûr qu’il aurait pu trouver dans la garde-robe occidentale un vêtement comparable à celui qu’il voulait défendre – n’est malheureusement pas Aristide Briand qui veut… On l’a vu, le corset n’est pas vraiment un bon candidat, il faut un vêtement clairement visible et qui établisse sans équivoque une démarcation, une coupure. Entre les femmes et les hommes, d’une part. Mais surtout entre les femmes qui respectent un commandement communautaire et les autres femmes d’autre part³. En ce qui me concerne… je ne vois pas, même en remontant dans le passé…

Complément d’informations

J’invite quiconque voudrait pousser la réflexion sur le vêtement religieux à lire les écrits de Naëm Bestanji, cet homme semble en savoir infiniment plus que moi sur le sujet. Voir par exemple son site personnel. Voir aussi, si vous voulez un autre son, le contrefeu allumé par Mediapart sur cette personne et ce qu’il professe.

1. la rentrée passée, ça s’est peut-être un peu calmé… ↩︎
2. je ne me fais cependant pas d’illusion, je pense que ce monsieur doit avoir des journées bien chargées, qui ne lui laissent guère le loisir de visiter des sites donnant des informations sur ce sujet précis… ↩︎
3. j’avoue hésiter un peu à expliquer ce point, je crains que ça ne m’amène un peu trop loin dans des directions qui n’ont pas leur place ici… ↩︎